dimanche 11 novembre 2012

Viva Fukushima !

Pas de quoi en faire une histoire, mais...




La mer
Qu'on voit danser le long des centrales nucléaires
A des reflets d'argent
Beaucoup d'argent !


 
     Je viens de recevoir un mail d'un reporter anglais, F. Nowan, relativement connu dans les milieux. Il me confie un témoignage de son récent voyage au Japon. Selon lui, le blog "Mythes et Chansons de Nulle Part" est la vitrine idéale pour son travail de type paradoxal. Flatté par son hommage, je ne peux qu'accepter de diffuser le reportage de ce charmant F. Nowan.
 
 
 

F. Nowan de retour :
" Après quelques pastilles d'iode et une bonne douche de décontamination,
qui pourrait croire que je reviens de là-bas ? "
 


     Après plusieurs courriers et coups de téléphones de mes boss - et des huiles de leur réseau - le groupe GRNJ (Gestion Rentable du Nucléaire au Japon) accepta enfin de me rencontrer. Le jour convenu, je me présentai dans mon plus beau costume, désireux de produire la meilleure impression : je souhaitais imposer quelques questions que je croyais désagréables. Après une succession de grooms, secrétaires et autres larbins à travers les corridors, escaliers et antichambres, je fus enfin introduit dans la salle de bal.
     Oui : la salle de bal ! Ces messieurs du GRNJ étaient en train de fêter leurs récents succès, déguisés en hippies ou en jockeys, et buvant champagne au carsher. J'émis un timide "Hello ! ". Ils crurent avoir affaire à l'un des leurs, grimé en reporter de classe pour amuser la galerie. L'alcool ayant considérablement amoindri la vigilance des fêtards du nucléaire, je pus imiscer mes questions avec naturel, sur le ton de la plaisanterie, ce qui d'ailleurs amusa terriblement mes interlocuteurs : rire des petites bizarreries de personnalité qui permettent de s'enrichir, rien n'est plus délicieux pour le milliardaire bon enfant. Place maintenant à l'interview :

     - Depuis le tsunami, les incidents se multiplient à Fukushima, et si le pire semble toujours avoir été évité, la situation reste assez alarmante (quelques infos au jour le jour) pour que beaucoup de ressortissants étrangers aient fui, de leur propre initiative, ou bien sur la demande pressante de leur ambassade.
     - Ils ont raison de s'enfuir ! Quant aux Japonais, ils n'ont pas d'autre pays, donc pas de bol, et pas de bol, pas de bras. Ils n'avaient qu'à s'enrichir avant le tsunami. Voyez notre modeste exemple : le jour où le Japon sera devenu définitivement inhabitable, nous habiterons ailleurs.
     - C'est ignoble ! Et si la centrale devient dangereuse à tel point que ce soit la planète qui devienne inhabitable ?
     - Restons sérieux ! Cela n'arrivera pas grâce à nos formidables outils de propagande. Considérez plutôt ceci : aujourd'hui, tous les Japonais sont fiers et heureux de vivre dans leur pays, même à quelques kilomètres de Fukushima, cela grâce à la propagande ! La propagande est plus forte que la pechblende.
     - Un peu partout dans le monde, l'industrie nucléaire influence, voire crée et dirige plusieurs instituts dits de sécurité nucléaire (deci, delà, par ci et par là) !  D'éventuelles décisions de l'ONU elle-même - pour des objectifs mineurs comme la sauvegarde de l'humanité - pourraient être court-circuitées par les lobbies ! Certains grincheux vont jusqu'à affirmer que c'est une façon totalitaire d'imposter son industrie, mais vous, qu'en pensez-vous ?
     - Oui, nous, les milliardaires du nucléaire, nous sommes plutôt fiers d'avoir ainsi manipulé l'humanité. Vous imaginez si les politiques pouvaient décider à notre place ? Avec la poltronnerie bien connue de l'électeur ! Nous vivrions l'enfer ou pire, la pauvreté ! Je n'ose y penser.
     - L'industrie nucléaire continue de prospérer alors que les citoyens sont de plus en plus opposés à cette énergie. En outre, lorsque surviennent les catastrophes, au lieu de répondre de leurs erreurs et de les réparer, les patrons du nucléaire se contentent d'accuser la rareté statistique, profitent de l'occasion pour vanter leurs nouveaux sprays anti-fin-du-monde et, dans les coulisses, ils somment leur gouvernement de faire le ménage : les bidons de déchets, en Sibérie, les journalistes curieux, en Sibérie ! Quelques esprits chagrins se permettent de dénoncer une situation inique, et vous, qu'en pensez vous ?
     - Nous avons eu plusieurs coups de génie pour en arriver là, nous ne pouvons que nous féliciter d'un tel résultat.
     - Mais... c'est le monde de vos propres enfants que vous êtes en train de détruire. Une fois la planète inhabitable, où iriez-vous jouir de vos bénéfices ?
     - Nous, les surhommes du profit, ne nous posons pas de telles questions. "Chaque jour ses plaisirs" : voilà notre devise. Tant qu'il y a du plaisir à racler quelque part, c'est pour nous ! Le jour où il n'y aura plus aucun plaisir à prendre où que ce soit, il sera temps de disparaître... mais au moins personne d'autre que nous en aura profité.
    - Bref Viva Fukushima !?
    - En effet mon brave ami !
   Et devant ma face interloquée, ces messieurs rondouillards entamèrent une joyeuse farandole en chantant :
    - C'est qui qu'on a tué le monde ? hein ? C'est qui qu'on a tué le monde ? Bin c'est nous ! C'est nous ! C'est nous qu'on a tué le monde ! (le film de curieux moment sera transmis à djPessoa très bientôt)
 
 
     Un reportage de F. Nowan - Novembre 2012 - Fukushima / London
 
 
 
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     Maintenant que nous voici guillerets, disposés au meilleurs ris et lazzis, voici quelques liens humoristiques :

Fukushima, mamour à moi : Informations en français

Tchernobyl, pour la vie !

Tchernobyl, après la mort aussi !




Chérie, la porte : courant d'air !
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

2 commentaires:

  1. Thanks dear dj pessoa ! Je vous transmets le film très bientôt.

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  2. You're welcome, Mr Nowan.
    Je suis en fait ravi de publier votre reportage : mes propres billets, au ton bon enfant, et rigoureusement dénués de sous-entendus, m'entraînaient peu à peu dans une routine démoralisante. Vous me redonnez goût à l'existence.

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Qu'enfin quelqu'un me quelque parte :